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Barthez : messie ou Chilavert ?

(Chronique, le 14 décembre 2006)
Barthez sur le retour...
 

Quelques soucis de connexion au réseau nous ont fait louper cette semaine « granguignolesque »… On rattrape le retard, car il vaut toujours mieux prévenir que guérir…Alors ? Même si on ne goûte que très modérément ces périodes de transferts, persuadés que nous sommes que les trésors sont à la maison, on ne peut pas ne pas évoquer la venue du « divin chauve… qui peut ». C'est parti… Qu'est-ce que vous pensez de l'achat de Fabien Barthez ? Euh… Y'a du pour, y'a du contre…Certes, mais encore ? Excusez-nous mais nous nous sentons un peu embêtés au moment de commenter l'arrivée de l'ancien Marseillais à Nantes. La première constatation est qu'elle sonne comme un auto-désaveu de l'ex-gardien Rudi Roussillon.

(© 2006) (http://www.fcnantais.com/articles/061214Barthez.php)


Politique à courte vue
Le président nantais s'était chargé lui-même du recrutement de Vladimir Stojkovic, il l'avait enrôlé contre l'avis de ses techniciens, il l'avait présenté, à 24 ans, comme une vedette, un futur grand espoir et, aujourd'hui, il le jette comme une vieille chaussette. L'avait-il seulement vu jouer ? L'échec du gardien serbe et l'embauche en catastrophe du vétéran ariégeois (il a eu 35 ans le 28 juin dernier) confirment aussi la politique à courte vue de dirigeants qui se sont montrés absolument incapables de préparer la succession de Mickaël Landreau. Alors qu'eux-mêmes, par la manque de lisibilité de leur politique, et même davantage pour Gripond, avaient contribué à son départ.

Aujourd'hui, la sanction est terrible : il leur faut sortir le chéquier et y inscrire un chiffre qui ferait s'affoler n'importe quel banquier.

Une équipe qui lutte pour le maintien a besoin d'un bon gardien
Cela précisé, nous en venons à deux constatations :

  • la première : il n'est pas interdit de reconnaître et de corriger ses âneries, on ne va donc pas blâmer Roussillon sur ce point.
  • la deuxième, évidente : une équipe, surtout quand elle lutte pour le maintien, a absolument besoin d'un très bon grand gardien. Sedan et Troyes qui, comme Nantes, ne sont pas très bien armés en ce domaine pourraient d'ailleurs être amené à le payer cher.

Or Stojkovic n'est pas un bon gardien, du moins sur ce qu'il a montré en France. Vincent Briant en est-il, en sera-t-il un ? On n'en sait rien. Aurait-il fallu donner sa chance à N'Dy Assembé ? Là on est dans le domaine des hypothèses.

Reste maintenant à savoir si Fabien Barthez est, ou plutôt EST ENCORE un grand gardien. Et c'est là que les interrogations commencent.

Le Barthez de l'équipe de France, oui
Le Barthez de 1998 n'aurait pas fait débat, pas plus que celui de 2000 ou de 2002. Encore qu'à l'époque, Nantes possédait un gardien qui n'avait pas grand chose à envier au « divin chauve » (son autre surnom, moins connu du grand public mais assez répandu dans le milieu, est « neurone manquant », lequel nous paraît d'ailleurs exagérément désobligeant). Landreau n'était alors pas très loin de Barthez et il semblait posséder un meilleur avenir, ce qu'il aura peut-être du mal à confirmer à Paris. Mais c'est une autre histoire.

Le Barthez de l'équipe de France est indiscutable, il a figuré pendant plusieurs années parmi les meilleurs spécialistes du monde. On ne dira pas LE meilleur, car c'est tout à fait stupide d'avancer une telle affirmation et on aimerait savoir si ceux qui la lancent ont bien vu jouer tous les gardiens du monde. C'est un peu comme Cannavaro Ballon d'Or, avouez qu'il y a de quoi rigoler.

Mais le Barthez d'aujourd'hui ?
Mais où en est Barthez à présent. Alors qu'il n'a pas joué depuis le 9 juillet, qu'il ne s'est pas entraîné, sinon à évoluer dans le champ avec les joueurs de Blagnac auxquels ce n'est pas faire injure que d'avancer qu'ils ne sont pas forcément tous dans une condition physique optimale.

On nous répondra : oui mais un gardien de ce genre ne perd pas ses qualités d'un seul coup, et patati et patata. Voire. Barthez a tout de même 35 ans et demi. Et en une saison et demie, il n'a joué que huit mois. D'ailleurs, après sa suspension de six mois, consécutive à son crachat sur un arbitre marocain, il lui avait fallu du temps pour revenir à un niveau qui, on regrette d'insister, n'était plus son meilleur. Sa Coupe du monde en Allemagne ? Elle a été fort satisfaisante mais il a été dans l'ensemble insuffisamment sollicité pour qu'on puisse se permettre une opinion précise le concernant.

En fait, Marseille nous avait paru, une fois n'est pas coutume, gérer parfaitement ce dossier. Il avait permis à Barthez de retrouver sa place, lui garantissant ainsi sa sélection en équipe de France, mais il s'était bien gardé, malgré ses désirs, de lui prolonger son contrat. Pas question de lui payer une saison de trop. Pas question non plus de faire plus longtemps barrage aux talents de Cédric Carasso, lequel, averti que son aîné allait quitter la Commanderie avait accepté d'attendre son tour sans manifester d'impatience. Pour un peu, les deux hommes seraient presque devenus copains, ce qui est plutôt rare avec Barthez dans les relations qu'il a pu entretenir avec ses remplaçants, et on ne parle pas là uniquement de Coupet.

Un véritable risque sportif
Embaucher Barthez maintenant constitue donc bel et bien un risque sportif. Est-ce judicieux ? Quelles sont ses chances réelles de réussite ? Franchement, on n'en sait rien. Et Roussillon qui n'a pas dû voir s'entraîner Barthez une seule fois, qui a peut-être à peine échangé trois phrases avec lui, puisque ce sont ses avocats qui traitent, Roussillon donc n'en sait pas davantage.

Une fois encore, il recrute sans savoir, sans prendre de garantie. Vous direz : Barthez quand même, c'est du sûr, est-il besoin de le voir pour le savoir ?

Chilavert aussi c'était du sûr…
Et quand Strasbourg, en 2000, avait embauché Chilavert c'était aussi du sûr, non ? Du moins d'après la majorité des commentateurs. Pensez : le gardien qui pratiquement à lui seul avait fait échec à l'équipe de France en Coupe du monde à Lens ! Le gardien qui marquait les coups francs ! L'homme qui transcendait toute son équipe, qui lui donnait confiance ! Le charismatique, l'emblématique, l'indiscutable Chilavert ! Un peu simplet question réactions ? Oh ! quelle importance ? Hélas pour Strasbourg, Chilavert arriva alors qu'il était hors de forme, il avait pris quelques kilos et à la fin de la saison 2001, le club alsacien, qui avait également changé d'entraîneur, descendit en D2.

On aura l'occasion de refaire un parallèle entre Strasbourg et Nantes…

Quelle sera son implication ?
Restons en au cas Barthez. Irréprochable donc avec l'équipe de France. Reste à savoir maintenant quel sera son degré d'implication à Nantes. Va-t-il s'impliquer totalement dans la vie de l'équipe ou vient-il uniquement pour engranger un dernier gros cachet (pardon : « pour relever un ultime défi sportif », comme ils disent) ?

Dans ses clubs, il a traîné plusieurs casseroles. Il est parti de Monaco en assez mauvais termes avec Claude Puel et Jean-Luc Ettori. A Manchester United, il faisait preuve d'un si grand « sérieux » qu'Alex Ferguson en avait été réduit à lui préférer des gardiens de deuxième catégorie. A contre-cœur, surtout quand il jetait un œil sur les bulletins de salaire de Barthez.

Une folie financière
On en arrive là au troisième volet de ce transfert : les exigences salariales du garçon. On sait qu'elles sont élevées. Et s'il s'est retrouvé au chômage, ce qui lui permet d'être immédiatement qualifiable, c'est uniquement parce que tous les clubs éventuellement intéressés par sa venue ont estimé que ses prétentions étaient devenues disproportionnées par rapport à son rendement. Toulouse notamment a fait machine arrière, son président Olivier Sadran s'opposant à Elie Baup qui, lui, en tant qu'intime de Barthez aurait vu son embauche d'un bon œil. Baup, aveuglé par son conformisme et ses liens amicaux, en avait même oublié qu'il possède dans son effectif un très bon jeune gardien en la personne de Nicolas Douchez. Ecœuré par son entraîneur, Christophe Revault a préféré partir.

Et Landreau c'était combien ?
On nous dit que Barthez va toucher à Nantes deux millions d'euros pour six mois. Plus les primes, dont évidemment une, très coquette, en cas de maintien. Plus une prolongation éventuelle de deux ans si tout se passe bien. Deux millions d'euros pour six mois ! On sait bien que ce club aime jeter l'argent par les fenêtres, mais tout de même ! On aimerait savoir combien Roussillon avait proposé à Mickaël Landreau, ce qui nous fournirait de plus amples précisions sur la volonté réelle qu'il avait à le conserver.

Si Barthez se montre à la hauteur, si surtout Nantes se maintient, le pari aura été gagné. Il coûtera cher mais le jeu en vaut peut-être la chandelle. Peut-être. Car on n'en est pas sûr, répétons-le. On n'en sait rien. On peut espérer. Tout en redoutant.

Du football au business
On nous dit aussi (journal « L'Equipe ») que l'arrivée de Fabien Barthez aurait aiguisé les appétits financiers de quelques uns de ses très chers amis. Laurent Blanc se serait remis sur les rangs pour le poste d'entraîneur que Marseille lui a refusé. Henri Emile serait évidemment dans son sillage. Et pourquoi Roussillon ne relancerait-il pas, pendant qu'il y est, Emmanuel Petit et Christophe Dugarry ? Et Desailly qui, après tout, a arrêté depuis peu. Et Aimé Jacquet qui arrive à la retraite légale mais qui va s'ennuyer, il ne ferait pas un excellent directeur sportif ? On lui ferait un contrat de vingt-cinq ans, ça le pousserait tout juste à 90, une paille pour Mémé-percussion. Allez Rudi sort le chéquier et fait rire toute la France !

Jusqu'en 2001, le FC Nantes faisait d'abord du football, il suscitait des rêves et collectionnait les titres. Avec la Socpresse et Gripond, il était entré dans l'ère du football-business, lequel l'a conduit en mai 2005, aux portes de la L2. Depuis que Roussillon et Dassault sont aux commandes, il fait surtout du business. Pour quels résultats ? Premier élément de réponse en juin. Mais on sait que le foot n'aime ni les fanfarons, ni ceux qui le trahissent trop. Pourvu que Barthez, lui, ait encore l'esprit au foot !


B.V., le 14 décembre 2006


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