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1965-66 : Rue de Strasbourg ? Non : rue Ramon Muller
(Petites et Grandes Histoires du FCN #10)
 

Alerte sur le but strasbourgeois gardé par Johnny Schuth.
 

Strasbourg est une équipe qui réussit généralement bien aux Nantais. En tout cas, elle ne gagne pas souvent en Loire-Atlantique : deux fois seulement depuis 1963. Attention toutefois de ne pas se gargariser avec les statistiques puisque comme, dirait Guy Roux, toute série est faite pour être interrompue et plus elle se prolonge plus on approche de sa fin. D’ailleurs les Alsaciens ont gagné une finale de Coupe de France face à Nantes, en 1966. Ils ont été aussi champions de France en 1979, juste devant le FCN, lequel possédait sans doute une meilleure équipe mais eut le tort de ne commencer vraiment le championnat qu’en octobre. Quand le jeune entraîneur Jean-Claude Suaudeau avait été invité à donner un coup de mains à Jean Vincent afin de remettre d’aplomb un football qui battait de l’aile. Eh oui, cela arrivait déjà il y a un quart de siècle. Mais revenons à Nantes – Strasbourg, c’est celui du 28 novembre 1965 que nous vous racontons aujourd’hui, le héros en avait été Ramon Muller. (B.V.)

     


1965-66 fut l’une des plus belles saisons du FC Nantes. Mais le Nantes – Strasbourg de cette année-là fut l’un des matches les plus acharnés, les plus durs, les plus féroces allions-nous écrire, qui se sont déroulés à Marcel-Saupin. Il est vrai que la rivalité entre les deux clubs allait alors crescendo et leurs rencontres s’apparentaient à celles de deux écoles, de deux philosophies. Les Alsaciens, entraînés par Paul Frantz, un théoricien aux idées bien arrêtées mais un peu courtes, à la poigne de fer aussi, comptaient parmi les partisans de la défense à outrance et de l’engagement physique forcené, au même titre que Bordeaux et Lyon. A Nantes, José Arribas, on le sait, prêchait d’autres vertus, lesquelles s’appelaient l’intelligence, l’imagination, la technique, l’offensive.

« Quelle mouche a piqué Kaelbel ? »    
Nantes et Strasbourg n’étaient pas fait pour s’accorder et les Alsaciens le firent sentir d’entrée aux Canaris lors de leur confrontation du 28 novembre 1965. Le championnat en était à sa 17è journée et le FCN, déjà couronné la saison précédente, occupait la tête avec 25 points, un de plus que Valenciennes. Il n’avait encore subi que deux défaites, la première à Rennes, le 11 novembre, la seconde à Sochaux la semaine précédente. Strasbourg, lui, était déjà distancé et il jouait sur la pelouse de Saupin ce qui ressemblait à sa dernière carte. Sentant qu’ils ne pourraient rivaliser sur le plan du football pur, les Alsaciens décidèrent de transformer le match en combat et dès la 3ème minute, Raymond Kaelbel, un international sur le retour, annonça la couleur. Il descendit méchamment Bernard Blanchet. La charge était d’une telle violence qu’un frisson d’effroi parcourut les tribunes et que l’encre se figea un instant dans les stylos des journalistes. « Quelle mouche a piqué Kaelbel ? », tel sera le titre de l’article qui paraîtra dans ‘France Football ».
  Bernard Blanchet  avait donné le tournis à Kaelbel, lequel l'avait pourtant agressé dès la 7è minute.

Marquage à la culotte
Ce n’était pas celle qui endort car les échanges qui suivirent furent grosso modo du même tonneau, plus les minutes s’écoulaient plus les tacles partaient haut et comme l’arbitre fermait délicatement les yeux les Nantais furent forcés de répondre afin d’éviter d’être broyés.
Bref, le match tourna à la bataille de chiffonniers, avec des Alsaciens qui, adeptes d’un marquage à la culotte effréné, suivaient leurs adversaires à la trace, tels les molosses qui guettent leur proie. Un accrochage entre Szepaniak et Ramon Muller fit monter un peu plus le voltage de la rencontre, d’autant que le Nantais, qui avait joué précédemment à Strasbourg, n’était pas du genre à se laisser faire. « J’ai trouvé à Nantes le jeu qui me permet d’extérioriser mes qualités, je suis enfin heureux », avait-il déclaré au cours de la semaine précédant le rendez-vous. Paul Frantz avait demandé à ses hommes de lui faire payer ses paroles au prix cher. Aussi, Szepaniak, commis à la surveillance du talentueux meneur de jeu nantais, ne le quittait pas d’une semelle et confondait allègrement ses chevilles et ses mollets avec le ballon.

Des arguments frappants
Mais Ramon Muller possédait un talent fou, une technique de vieux roublard argentin et beaucoup de malice. Quand il avait décidé de briller il était difficilement arrêtable. Il était doté aussi d’une redoutable frappe sur coup franc et c’est de cette manière qu’il ouvrit le score, d’un tir brossé, à la 34è minute.
Les Strasbourgeois ne se calmèrent pas pour autant, ils continuèrent à jouer de la faucheuse, soulevant l’indignation du public et celle des reporters. Dans « Miroir Sprint », écrira : « Les 15.000 spectateurs n’avaient jamais assisté à des gestes aussi dépourvus de toute signification sportive. Si l’arbitre avait renvoyé Kaelbel au vestiaire, Szepaniak se le fut sans doute tenu pour dit mais la faiblesse du « referee » encouragea au contraire tous les mauvais instincts. En ce qui concerne le football défensif et l’utilisation d’arguments frappants, les Alsaciens ont désormais dépassé Bordeaux. »

Le Chenadec signe le KO
En seconde période, Paul Frantz ne modifia pas ses plans, il y était trop attaché. Il changea cependant les rôles et c’est Stieber, le malheureux, qui fut désigné pour empêcher Ramon Muller de jouer. Le problème pour les Alsaciens est qu’ils encaissèrent un deuxième but, synonyme de KO, dès la 47è minute. Gilbert Le Chenadec, monté de l’arrière, surgit à point nommé pour reprendre un centre de la droite de Blanchet, qui avait échappé une fois de plus à Kaelbel, et pour l’expédier au fond des filets.

« Regarde, la cathédrale de Strasbourg ! »
Ramon Muller avait été le héros de la rencontre.  
Cette fois, les Alsaciens baissèrent la tête et la suite ressembla à une démonstration. Bako Touré expédia un ballon sur la transversale puis, surtout, Ramon Muller multiplia les numéros de jonglage à l’encontre de Stieber. A un quart d’heure de la fin, il le dribbla puis, ostensiblement, il s’arrêta et au moment où il revenait sur lui il le dribbla de nouveau. Le cerbère frôlait le ridicule, il l’atteignit quelques instants plus tard. Muller se présenta de nouveau face à lui, ballon entre les pieds et, soudain, il s’arrêta. Stieber restait bloqué, hésitant à porter son tacle. Alors, Ramon monta les deux pieds sur le ballon et, plaçant l’une de ses mains sur le haut de son front, au-dessus des yeux, il fit mine des scruter l’horizon. On l’entendit alors lancer fort distinctement : « Eh regarde, derrière toi, tu ne la vois pas ? La cathédrale de Strasbourg ! »


La rue de Strasbourg débaptisée
C’en était trop pour Stieber : fou de rage, il se précipita et Ramon dut prudemment battre en retraite tandis que les autres Alsaciens, tant bien que mal, ceinturaient leur coéquipier afin de l’empêcher de se livrer à des exactions qui lui auraient valu l’expulsion.
Le score en resta à 2-0. C’était un minimum. Le soir, dans les cafés de la ville, on se raconta l’histoire jusqu’à plus soif, l’enjolivant un peu plus au fur et à mesure que le muscadet coulait. Ramon Muller n’avait jamais compté autant de supporters et sur le coup de minuit un groupe de plaisantins, munis d’une échelle et d’un pot de peinture, alla débaptiser la rue de Strasbourg. Ils écrivirent à la place « rue Ramon Muller ».

B.V

Alerte sur le but strasbourgeois gardé par Johnny Schuth.


La fiche du match :

Le 28 novembre 1965, à Marcel-Saupin : Nantes bat Strasbourg 2-0.
Buts de Ramon Muller (34’), Le Chenadec (47’). 14.376 spectateurs. Arbitre : Poncin.

Nantes : Eon – Grabowski, Budzynski, Le Chenadec, De Michèle – Robin, Muller – Blanchet, Gondet, Touré, Magny.
Strasbourg : Schuth – Hauss, Devaux, Kaelbel – Stieber, Gonzales, Szepaniak – Gress, Merschel, Farias, Hausser.


(B.V., le 25 février 2005)

  Histoires du FC Nantes :

- #21 : Henri Michel : Quiconque a aimé un jour le jeu à la Nantaise… (27/08/18)
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- #1 : Joies et Peines (Gondet et Éon). (28/10/04)


Cette rubrique s'ouvre aux souvenirs, à ces pages qui sont restées dans les mémoires et qui ont fait l'histoire du FC Nantes. Un témoignage d'une autre époque qu'il est bon de rappeler. Pour que le témoin passe de générations en générations, les lecteurs de FCNantes.com peuvent contribuer à enrichir ces belles pages de leurs témoignages en nous écrivant. De la simple anecdote aux souvenirs de grands matchs ou de grands joueurs, n'hésitez pas à participer à cette lucarne ouverte sur le passé glorieux de notre club.


 

 

 
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